Océan Indien par Imaz Press, lundi 30 septembre 2024 à 14:50

Austérité budgétaire : Budget 2025 : les Outre-mer (peut-être) sacrifiés sur l’autel des économies à trouver par le gouvernement

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Michel Barnier et son gouvernement prévoient de présenter le budget 2025 dans la semaine du 9 octobre 2024. Selon plusieurs informations concordantes, à la recherche d’économies, le gouvernement compterait amputer de 200 millions d’euros le budget alloué aux Outre-mer. Cela pour tenter de renflouer les caisses de l’Etat frappées par un important déficit

D'après des parlementaires et le site Politico, le Premier ministre envisagerait de faire des économies dans plusieurs postes de dépenses pour le prochain projet de loi de finances dont une baisse de 9,2 % pour les Outre-mer, soit une coupe de plus de 200 millions d'euros, passant de 2,7 milliards à 2,5 milliards d'euros.

????EXCLU POLITICO : Le gouvernement a enfin transmis au Parlement ses pistes de dépenses (le fameux tiré à part) pour le projet loi de finances 2025. ????https://t.co/yC8cJeMSml pic.twitter.com/raMyTAL3vd

— Paul de Villepin (@Devillepinpaul) September 19, 2024

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- Une "purge" budgétaire -

"200 millions d’euros, c’est moins de crédits pour le logement, moins de crédits pour les aides économiques aux entreprises, moins de crédits pour la continuité territoriale, moins de crédits pour les collectivités territoriales…", abonde le député Philippe Naillet dans un communiqué.

"Le sujet principal d’inquiétude concerne le budget des Outre-mer 2025. La menace est sérieuse", indique la Région Réunion dans un communiqué.

"C'est scandaleux", lance la députée Émeline K/Bidi. "Les Outre-mer sont les territoires les plus pauvres de la République, dit-elle, rappelant qu'à La Réunion, le taux de pauvreté est de 37%.

"Des gens vivent dans leur voiture, n'arrivent plus à manger et avec cette baisse c'est comme si tout cela était passé aux oubliettes", s'insurge l'élue.

"Il ne faut pas réduire le budget des Outre-mer", lance la députée Émeline K/Bidi. "On ne construit pas de logements, on n'agit pas contre la vie chère, la sécurité ou l'immigration avec une réduction des aides", s'insurge-t-elle.

Pour la sénatrice Audrey Bélim, à l'inverse, "le budget des Outre-mer aurait dû s'indexer sur l'inflation".

"On va avoir des coûts encore plus importants et moins d'argent et ce sont nos collectivités locales qui seront en première ligne."

Stéphane Fouassin, pourtant proche de la majorité, a également confié que "si le budget baisse, les élus devront monter au créneau". "Il ne faut pas que l'on perde autant de moyen comme l'a annoncé le ministère.

Le sénateur le dit, s'il constate une baisse du budget dans les Outre-mer, "il votera contre".

De façon imagée, le député Frédéric Maillot lance : "nous avons mis le Mozart de la finance et il lit la mauvaise partition". "Il faut combler un trou et il ne veut pas chercher l'argent chez les riches dont forcément on prend toujours chez les plus pauvres."

L'élu qui - comme ses collègues de La Réunion – "ne votera pas le budget".

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- L'État reste sourd face à la colère des Outre-mer -

Si la réduction budgétaire se confirmait Michel Barnier devra trouver un très bon argumentaire pour expliquer aux Réunionnais en particulier et aux ultramarins en général, pourquoi l'État a décidé de rogner sur les enveloppes allouées à la lutte contre la vie chère, le logement, la continuité territoire.

D'autant que plusieurs départements, à l'instar de la Martinique ou de la Guadeloupe, se déjà fortement mobilisés contre la vie chère.

En 2018, La Réunion avait massivement protesté contre la vie chère avec le mouvement des gilets jaunes. Plusieurs barrages sont installés dans les quatre coins de l’île, perturbant très fortement la circulation. Les revendications sont nombreuses, de la hausse du prix des hydrocarbures à la question du pouvoir d’achat en passant par le chômage et la défiance croissante vis-à-vis des élus.

Démarre alors 15 jours d’une paralysie inédite de l’île, provoquant des perturbations sur le réseau aérien, la panique dans les supermarchés, et une division palpable au sein de la population, avec des tensions qui se transforment par moment en heurts avec les forces de l'ordre.

Si le gouvernement ne prend pas la mesure de ce sujet, nul doute que d'autres feront entendre leur colère, exacerbant encore plus les tensions sociales entre l'Hexagone et les Outre-mer.

Émeline K/Bidi prévient : "quand les gens n'ont plus rien à perdre, la colère est difficile à calmer". "Quand les gens n'arrivent plus à se nourrir et n'ont plus d'espoir et que les gouvernements se succèdent et se ressemblent, il peut y avoir des manifestations très dures."

Pour rappel, en 2021, 36 % des Réunionnaises et Réunionnais vivaient sous le seuil de pauvreté. Ce taux de pauvreté baisse par rapport à 2019, avant la crise sanitaire, mais reste égal à celui de 2020.

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À La Réunion également et selon l'Insee, l'écart de prix des produits alimentaires en Outre-mer avec ceux de l'Hexagone frôlait les 37 % à La Réunion.

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À cela s'ajoute la crise du logement. Il y a 46.000 demandes de logements à La Réunion, pour 1.600 livraisons de logements neufs par an, et 5.000 réponses positives.

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- La situation est inédite -

Outre la population, le gouvernement devra aussi rassurer Bruxelles, le pays étant depuis juillet visé par une procédure européenne pour déficit excessif lancé par la Commission européenne.

"La situation est inédite", explique Christiane Rafidinarivo, politologue, chercheuse associée au LCF – Université de La Réunion et au Cevipof Sciences Po.

"Ce gouvernement aura un programme et forcément des différences sur les choix budgétaires liés aux choix politiques alors comment faire pour que cela se reflète dans le budget" dit-elle. "Va-t-on partir avec un budget qui ne reflète pas le programme du gouvernement ?", pose-t-elle.

La politologue se demande même si au final, on aura un budget, sachant "que le gouvernement risque d'être menacé de censure".

"Si le gouvernement n'est pas censuré il pourra présenter le budget et ses amendements mais à l'inverse comme le pourra-t-il ? Il faut que le parlement s'organise pour que ce vote ne dure pas et il faudrait pour cela un minimum s'entendre et là ça n'a pas l'air de se présenter comme", lance Christiane Rafidinarivo.

Si la loi de finance n'est pas votée, "on ne sera pas sans budget, mais nous serons dans une séquence parlementaire qui risque de prolonger le temps de vote ou alors d'aboutir à une solution provisoire pour au moins fonctionner cette année" termine la politologue.

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

mots clés de l'article : Economie , Actus réunion

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