Le climat se dérègle : Fortes chaleurs, peu de pluies… La Réunion face à de (futurs) bouleversements climatiques
À La Réunion la semaine passée (le 12 et 13 octobre 2023), se sont tenues les Assises régionales des risques naturels au Moca à Saint-Denis. Objectifs, permettre de se rendre comptes des aléas climatiques auxquels La Réunion devra faire face dans les années à venir. Chaleurs, inondations, mouvements de terrain, érosion, montée des océans… le dérèglement climatique est bel et bien là. La situation va aller en s’empirant, mais il est encore temps de limiter l’impact négatif des hommes sur le climat (Photo www.imazpress.com)
Depuis toujours, La Réunion est soumise aux sept des huit aléas climatiques majeurs. Feux de forêts, tempête, érosion, mouvement de terrain… "Notre territoire insulaire se caractérise par sa fragilité", note Huguette Bello, présidente de Région.
Une fragilité dont La Réunion a fait les frais dans les années passées.
Remémorons-nous, en 1970 – incendie le plus important qu'a connu La Réunion – 4.500 hectares ont brûlé entre le Maïdo et le Grand Bénare. Plus récemment en 2011, 2.700 ont pris feu, encore au Maïdo. 800 pompiers avaient été mobilisés pendant près de trois mois.
Lire aussi - Feux de forêts : La Réunion n'est pas à l'abri
Les mouvements de terrain n'ont pas non plus épargné La Réunion. En 1875, à Salazie, 63 personnes ont perdu la vie. En 2006, trois personnes sont décédées suite à un éboulement sur la route du littoral.
Lire aussi - Eboulement à la Rivière de l'Est, le belvédère du Cassé est détruit
Les cyclones passés au plus près de notre île, sont aussi dans toutes les mémoires. Les Réunionnais se souviennent du cyclone Hyacinthe, passé trois fois sur La Réunion, provoquant la mort de 25 personnes. En 1989, Firinga a fait quatre victimes et plus de 6.000 sinistrés.
Lire aussi - Météo France : 30 ans de prévisions cycloniques à La Reunion
Selon la présidente de Région, "ces exemples ne sont qu'un bouquet par rapport à ce qui va se passer dans les années à venir".
- Ça va chauffer à l'avenir -
À La Réunion, les années à venir ne s'annoncent donc guère mieux, voire pires si la situation ne change pas. D'ailleurs, les chaleurs de ces derniers temps n'en sont qu'un avant-goût.
Sur le long terme, les vagues de chaleur augmenteront, avec des températures moyennes quotidiennes pouvant atteindre les 35,5 sur Gillot.
Les températures prévues pour la fin du siècle se situent d'ailleurs dans une fourchette comprise entre 1 degré de plus pour le scénario optimiste (avec une baisse des émissions de gaz à effet de serre) et 3,5 degrés pour le scénario pessimiste.
"À noter que c'est durant la saison chaude que la hausse des températures sera la plus élevée", indique Marie-Dominique Leroux, responsable du service étude et climatologie à la direction de Météo France Océan indien.
Lire aussi - Météo à La Réunion : attention, cet été… ça va chauffer
Une hausse des températures et peu de pluies pour rafraichir. "À l'horizon 2080, les modèles montrent un assèchement de l'ordre de 5 à 10 % des pluies annuelles."
En saison sèche (juin à décembre), l'impact du changement climatique sur les précipitations devrait se manifester par une baisse des précipitations à grande échelle et un allongement de la saison sèche lié à un probable retard de la saison des pluies.
"S'il y a une baisse légère des précipitations, au deuxième semestre on aura des sécheresses plus sévères et plus fréquentes", explique Marie-Dominique Leroux.
Et pourtant, alors que la pluie se fait rare, dès lors qu'il pleut, les rues sont souvent inondées. "Il y aura des extrêmes avec des années pluvieuses et des années sèches. Et quand il pleuvra, l'événement sera intense et davantage d'eau va tomber."
S'il va faire plus chaud, et qu'il pleuvra moins, les alizés seront eux plus vigoureux.
- Des cyclones plus rares mais plus intenses -
La saison cyclonique que l'on connaît est et sera elle aussi impactée par le dérèglement climatique. Chaque année, une dizaine de systèmes tropicaux se forment et s'intensifient dans le bassin sud-ouest de l'océan.
D'après les simulations climatiques, des précipitations plus rares mais plus fortes, associées à un système tropical, feront que les systèmes seront plus intenses.
"La possibilité que les cyclones les plus intenses puissent évoluer à des latitudes plus australes exposant ainsi La Réunion est accrue", indique Météo France.
En résumé, des températures plus élevées, des précipitations plus rares et des vents plus forts, "viendront aggraver l'assèchement des sols". De l'autre côté, les pluies courtes mais intenses entraineront des risques de submersion, notamment en raison de l'élévation du niveau de la mer.
- Des sols plus qui risquent de s'effondrer -
Des pluies plus rares mais plus fortes, des températures plus élevées… des "phénomènes climatiques qui exacerbent les mouvements de terrain et l'érosion à La Réunion", souligne Marie Chaput, ingénieur risques naturels au BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières).
Les secteurs les plus concernés sont les cirques "avec des formations géolocalisées sensibles à l'érosion, les remparts" et le littoral "concerné par le retrait de côte".
Des phénomènes climatiques provoqués également par l'urbanisation massive, notamment sur le littoral.
"Sur nos cartes, on voit bien que les zones exposées aux inondations et à l'érosion sont densément peuplées", explique Caroline Coudrin, responsable cellule évaluation statistique à la DEAL.
Lire aussi - À La Réunion, le dérèglement climatique accélère l'érosion
Mais les risques que nous rencontrons sont-ils réellement naturels ?
"Pour la plupart des risques, si la manifestation est naturelle, la cause profonde est réelle et pas forcément naturelle car il y a des multi-crises dont nous sommes à la fois responsables et victimes", note Vêlayoudom Marimoutou, secrétaire général de la Commission de l'Océan indien "(COI).
Des crises avec des conséquences humaines, humanitaires, économiques, sanitaires et écologiques.
Face à cela, il est plus que temps d'agir, afin de ne pas aggraver un dérèglement climatique déjà à l'œuvre.
Il en va de la responsabilité de tous, que cela soit en termes d'actes du quotidien ou encore d'aménagements.
À La Réunion d'ailleurs, l'observatoire du littoral – prochainement formalisé – travaille déjà pour connaître, surveiller, sensibiliser l'évolution du réchauffement climatique.
ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com