Sécurisation des données : Papiers dématérialisés : un portefeuille bientôt vide et une fracture numérique encore plus grande
De plus en plus, les Réunionnais vont devoir se passer de leurs papiers de façon matérielle. Qu’il s’agisse de la vignette verte depuis le 1er avril ou encore du permis. Si la vignette est désormais disponible pour les forces de l’ordre via un fichier des véhicules assurés (FVA), le permis lui sera dématérialisé sur France Identité. Des papiers qui sont les premiers du genre à être en ligne ne seront certainement pas les derniers. Toutefois, face à la hausse des cyberattaques, se pose la question de la sécurité de ces données en ligne (Photo www.imazpress.com)
Votre portefeuille comme votre boîte à gants vont progressivement se vider de leur collection de documents administratifs au profit de votre compagnon du quotidien, le smartphone.
Terminée la peur d'avoir oublié son permis à la maison ou oublié de changer sa vignette verte sur son véhicule… ces derniers sont désormais disponibles en ligne dans l'application France Identité.
"Notre ambition commune, est qu’à partir de juin 2025, le portefeuille d’identité numérique devienne le compagnon d’identité des citoyens français et européens permettant de garantir la sécurité de leurs démarches auprès, par exemple, des administrations, des banques, des opérateurs téléphoniques, du corps médical, tout en gardant la maîtrise de leurs données d’identité" a expliqué le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin.
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- Le tout numérique peut-il résister aux fuites ? -
Mais face à la généralisation de la dématérialisation des papiers d'identité – aujourd'hui le permis, l'assurance et bientôt la carte vitale ou encore la carte grise - une question se pose, celle de la sécurité. Faut-il faire confiance à ce duplicata qui apparaît sur l’écran de notre smartphone ou bien, au contraire, garder nos papiers bien au chaud dans un portefeuille ?
La question est légitime, alors que les affaires de piratages se multiplient, à l’image de celle ayant touché deux entreprises de gestion de tiers payant et permis la fuite des dates de naissance, numéros de Sécurité sociale et états civils de quelque 33 millions de personnes ou encore les espaces numériques des élèves Français piratés.
Au ministère de l'Intérieur, on veut se montrer rassurant. La numérisation de nos cartes d’identité, permis de conduire et bientôt carte Vitale contenant des données sensibles est soumise, en France, à des règles strictes permettant d’éviter, à niveau de sécurité maximal, tout risque de piratage ou de fuite.
L’ANTS (Agence nationale des titres numérisés) explique que l’ensemble du système a été validé par la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés) et "qu’il n’y a pas d’échanges entre les différentes bases de données".
Le stockage des données personnelles des citoyens est, en outre, sécurisé sur un cloud souverain basé en France.
Interrogée par Imaz Press, la Cnil, explique que "France Identité Numérique est une application permettant aux titulaires d’une carte nationale d’identité électronique (CNIe) dotée d’une puce, de bénéficier d’un moyen d’identification dématérialisé permettant de prouver son identité ou des attributs de son identité".
Ce dispositif permet la création d’une identité numérique d’État de haut niveau, "soucieuse de la vie privée des usagers, en permettant notamment une divulgation partielle des attributs d’identité en fonction des besoins. Ce dispositif devrait permettre d’améliorer la sécurité des procédures (en supprimant par exemple la circulation de photocopies de pièces d’état-civil lors de l’accomplissement de démarches administratives) en participant à la lutte contre la fraude documentaire", indique Yohann Brunet, chargé de relations médias à la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
"Le dispositif prévoit un moyen d'identification électronique de niveau élevé au sens du règlement européen "eIDAS", lequel garantit une vérification approfondie de l’identité (par exemple, par un entretien en face-à-face avec la personne pour la création de son identité) et requiert une authentification forte."
"Les données traitées par l’application France Identité sont stockées dans le téléphone. Il s’agit des données du titre d’identité, des données de contact, de l’historique des transactions et des données permettant l’identification du téléphone. Par ailleurs, ces données sont protégées par un système de chiffrement et elles ne sont lues par l’application que lorsque l’utilisateur donne son consentement en saisissant un code personnel", poursuit la Cnil.
Comme l'explique le gouvernement ici, pour se connecter, le système propose un double facteur d'authentification, avec deux codes différents - sa carte d'identité physique et un code personnel à six chiffres.
Ce dernier est à utiliser "pour chaque vérification d'identité", et "après trois tentatives manquées, la carte est bloquée, une nouvelle vérification d’identité est nécessaire pour la débloquer", renseigne l'État.
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- Avec la dématérialisation, comment bien sécuriser nos données ? -
Si cette innovation technologique représente un pas de géant vers la simplification administrative, la sécurité des données personnelles reste une préoccupation majeure.
Les services de la gendarmerie de La Réunion informent que "le système est largement sécurisé si les personnes respectent scrupuleusement les démarches notamment via France Connect et via les seuls services internet d'Etat."
Toutefois, "les arnaques touchent tous les sujets et l'inventivité des escrocs est sans limite ... "
"La vigilance reste la règle : pas de réponse à lien reçu par sms d'un numéro inconnu, ne pas communiquer ses données bancaires ou son identité sans vérifier le site sur lequel je navigue", ajoute la gendarmerie.
Que faire si votre précieux allié technologique tombe entre de mauvaises mains ? En cas de vol ou de perte du téléphone, les données personnelles peuvent être exposées à un risque d'escroquerie ou d'usurpation d'identité.
Si votre smartphone est perdu ou volé, "il est possible de supprimer à distance votre identité numérique via le site de France Identité, une démarche à effectuer en urgence si aucune autre mesure de sécurité n'est activée", précise la Commission, interrogée par Imaz Press.
S'il s'avère que vous êtes victime d'une usurpation d'identité, il faut aller porter plainte à chaque fois qu'une action est effectuée en votre nom.
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- Gare à la fracture numérique -
Si la question de la sécurité de nos données se pose, celle de l'accès au numérique l'est tout autant.
Bien entendu, il semblerait absurde aujourd’hui de revenir sur le principe de la dématérialisation des démarches pour l’accès aux droits des usagers.
Ce monde du numérique présente bon nombre de points positifs comme ne pas oublier ses papiers sur soi. Des intérêts environnementaux sont aussi mis en avant : moins d’émissions de papiers... Et pourtant, cette numérisation met de côté certains citoyens de leurs services publics.
Entre 17 % et un tiers de la population est, en effet, en difficulté face au numérique. En cinq ans on est passé, selon le Credoc, de 13 à 16 millions de Français souffrant d’illectronisme. À La Réunion, 116.000 Réunionnais seraient en situation d'illettrisme et d'illectronisme soit 23 % de la population du territoire, indique l'Insee. Des chiffres qui datent de 2011. Aucune donnée plus récente n'existe.
"L’application France Identité est facultative et la CNIL a insisté sur la nécessité de ne pas rendre ce moyen d’identification électronique obligatoire afin de garantir un accès égal à tous les publics aux services hors ligne et en ligne, publics comme privés", indique la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
Il n'y aura aucune obligation à le télécharger sur le téléphone. "Le permis de conduire dématérialisé ne remplace pas, il complète", précise le ministre de l'Intérieur.
"Il n'y aura dans tous les cas aucune obligation de passer au numérique, le physique et le digital vont coexister."
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