Réunion par Imaz Press, mardi 28 juin 2022 à 02:00
Pilier du secteur agricole à La Reunion

Dominique Clain : "s’il n’y a plus de canne, il n’y a plus d’agriculture"

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Alors que le conflit s’enlise entre planteurs et industriels, l’avenir de la filière canne est sur toutes les lèvres. Production historique et traditionnelle de l’île, la canne représente un patrimoine certain de La Réunion, que les planteurs sont décidés à protéger. Malgré les difficultés, ces derniers en sont persuadés : l’île peut atteindre l’autonomie alimentaire. Cela sans toucher aux 22.000 hectares dédiés à la culture de la canne, car s’il n’y a plus de canne, il n’y plus d’agriculture", affirme Dominique Clain président de l’UPNA (Photo : rb/www.ipreunion.com)

"1.800 hectares suffiraient pour atteindre l’autosuffisance alimentaire à La Réunion, et nous avons plus de 6.000 hectares en friche dans l’île : pourquoi devrions-nous nous séparer des terres de la canne ?" s’interroge Dominique Clain, président de l’UPNA.

Dans ce secteur qui emploie directement et indirectement 12.000 personnes, la transformation des champs de canne n’est pas envisagée. "Ces terres ne sont pas adaptées à une culture différente, ce dont nous avons besoin, c’est de nouvelles friches pour produire en plus grande quantité les produits de nécessité " estime Dominique Clain. Un avis partagé par la Chambre d’agriculture, qui table de son côté sur 1.000 hectares nécessaires pour développer l’agriculture réunionnaise. "L’autonomie alimentaire, ce n’est pas produire absolument tout ce que nous importons, mais réussir à produire en quantité suffisante les produits essentiels" a déjà estimé Frédéric Vienne, président de la Chambre d’agriculture, suite au déclenchement de la guerre en Ukraine.

- Climat tropical et facilité d'entretien - Au-delà de l’attachement à la culture de la canne, les agriculteurs mettent aussi en avant le climat particulier de La Réunion, où de nombreux micro-climats cohabitent. Cyclones, fortes pluies et sécheresses font aussi partie du paysage climatique de l’ile. "Demain matin, si on a un cyclone, où allons-nous prendre les produits abîmés par les pluies et le vent ? La canne est une culture sûre, qui tient l’érosion, qui survit aux intempéries" souligne Dominique Clain.

Il estime qu’il n’y a pas de culture qui puisse remplacer la canne aujourd’hui. "C’est un pilier économique de La Réunion : s’il n’y a plus de canne à La Réunion, il n’y plus d’agriculture. C’est la filière canne qui apporte sa plus-value qui permet d’avoir d’autres cultures" assure-t-il. "Il faut aussi savoir que la canne est la plus simple à cultiver : c’est un produit qui est bien moins polluant, si on fait un bon traitement d’insecticide lors de la coupe, on attend juste un mois pour la traiter de nouveau, contraient à d’autres fruits et légumes qu’il faut traiter trois ou quatre fois par mois" avance le président de l’UPNA, alors que la question écologique est désormais un argument de poids en matière d’agriculture.

- Pour une revalorisation de la canne - Comment sortir alors de l’impasse dans laquelle semble se trouver la filière aujourd’hui ? Les agriculteurs réclament une revalorisation de la canne, de la bagasse et de la mélasse, afin d’améliorer la filière et garantir des revenus décents aux planteurs. "Nous avons des sucres spéciaux, qui se vendent très bien en Métropole : il y a un travail à faire de ce côté pour monter en puissance. Il y a aussi la bagasse, que nous pouvons valoriser : au lieu d’importer des copeaux de bois pour l’énergie, ce qui pollue, on pourrait faire la matière première directement ici à La Réunion. On pourrait aussi travailler plus sérieusement sur le rhum" liste Dominique Clain.

De nombreuses pistes à explorer, donc, mais qui restent aujourd’hui en suspens tant qu’aucun accord n’a été trouvé. A quelques jours du lancement de la campagne sucrière, les agriculteurs pressent les industriels de faire un pas vers eux, tandis que l'Etat a accordé 14 millions d'euros de subvention. "On parle de subventions conséquentes qui nous permettent de survivre, personnellement je ne dirais pas qu’elles le sont vraiment. Nous n’avons d’ailleurs pas de problème particulier avec l’Etat, qui joue le jeu. Le problème concerne les industriels, qui refusent d’augmenter leur prix d’achat de la tonne de canne" indique Dominique Clain, alors que le prix n’a pas évolué en 40 ans. La mobilisation continue en tout cas, alors qu’une nouvelle réunion doit se tenir ce mardi avec les industriels. Et si aucun accord n’est trouvé, les planteurs ne cachent pas leur intention de continuer la mobilisation. Avec déversement de canne à sucre devant la préfecture si nécessaire.

as/www.ipreunion.com

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